Décrochage scolaire : stop à l’hémorragie ! Pour une obligation de formation jusqu’à 18 ans.

Chaque année, 100 000 jeunes « décrochent » du système scolaire, dont plus de 60 000 mineurs. Cette hémorragie est un terrible gâchis dont il faut prendre toute la mesure. Il est urgent d’améliorer le repérage de ces jeunes et de s’assurer de leur accès à une qualification. Le projet de loi pour une école de la confiance, examiné à partir d’aujourd’hui à l’Assemblée nationale, doit être l’occasion de mettre en place l’obligation de formation jusqu’à 18 ans. 

Passés à travers les mailles du filet, oubliés des dispositifs de lutte contre la pauvreté et l’exclusion car « en dehors des radars », ces jeunes décrocheurs peu ou pas qualifiés sont les nouveaux visages de la pauvreté. Ils sont 2 millions à n’être aujourd’hui ni en emploi, ni en formation, ni en études et pour eux, souvent, la vie ressemble à une impasse. Il est inacceptable que certains de nos concitoyens se sentent ainsi condamnés à l’échec. 

Depuis 40 ans, les politiques de lutte contre la pauvreté se trompent de cible en s’attachant principalement à ce que l’on vive « un peu mieux » dans la pauvreté, plutôt que de permettre d’en sortir ou, mieux, de ne pas y tomber. Cette approche est inefficace voir même clairement cynique car le résultat est que la pauvreté reste un cul de sac.  

La situation est particulièrement grave chez les jeunes, avec un taux de chômage deux fois plus élevé et environ un jeune sur 5 qui vit sous le seuil de pauvreté.

Les politiques de lutte contre la pauvreté et d’insertion des jeunes doivent vivre leur révolution copernicienne. Nous devons arrêter de soigner les symptômes et nous attaquer aux racines du mal : nos efforts doivent porter sur la prévention de la pauvreté, d’une part, et sur un meilleur accompagnement dans l’insertion d’autre part. 

La première des priorités doit être de s’assurer de l’accès de tous les jeunes à une qualification : le taux de chômage des non diplômés est 5 fois supérieur. Il faut tout faire pour qu’aucun jeune ne sorte du système scolaire sans qualification. C’est l’ambition de la proposition faite dans le cadre de la stratégie de lutte contre la pauvreté pour rendre obligatoire la formation jusqu’à 18 ans. Les débats sur l’école de la confiance qui arriveront dans l’hémicycle lundi prochain, et qui doivent permettre de rendre la scolarité obligatoire dès 3 ans, sont l’occasion d’inscrire cette mesure ambitieuse dans la loi. 

Il y a urgence car la France a changé  depuis 1959 et l’ordonnance Berthoin qui instaurait l’instruction obligatoire jusqu’à 16 ans, toujours en vigueur aujourd’hui. En 1959, le taux de chômage était inférieur à 2,5%, l’accès au marché du travail plus simple et les besoins des acteurs économiques différents. 

Aujourd’hui, sortir du système scolaire à 16 ou 17 ans compromet largement l’insertion sociale et professionnelle comme peuvent en témoigner les acteurs de terrain (missions locales, écoles de la deuxième chance, pôle emploi…) qui se démènent pour trouver des solutions à des jeunes peu ou pas qualifiés.  

Cette obligation de formation jusqu’à 18 ans a déjà fait ses preuves dans d’autre pays en permettant de diminuer le taux de décrochage et d’augmenter la proportion de jeunes adultes obtenant un diplôme. Si sa mise en oeuvre opérationnelle reste à affiner, elle pourrait engager le jeune tout comme la collectivité, à l’instar de l’obligation d’instruction qui existe aujourd’hui. Pour être efficace, elle devra s’appuyer tout autant sur les filières générales que sur la formation professionnelle, l’apprentissage, les micro-lycées ou encore les écoles de production.

Après l’instruction obligatoire jusqu’à 16 ans, il est grand temps de franchir une nouvelle étape en rendant la formation obligatoire jusqu’à 18 ans. Il est temps de contredire le célèbre écrivain Henry de Montherlant qui décrivait la jeunesse comme le « temps des échecs », pour en faire l’« âge des possibles » ! 

Partagez cet article !